La leçon marocaine de mon grand-père sur la négociation

La négociation est un art qu’il faut savoir maîtriser lorsque l’on est à son compte. Pourquoi ? Parce qu’il est primordial que vous puissiez obtenir gain de cause lorsqu’un client s’essaiera à baisser le montant de vos devis par exemple. À travers ce court article, je vous propose de découvrir comment cela fonctionne dans un pays où la négociation fait partie intégrante de la culture. Ma première expérience de la négociation racontée à travers une histoire familiale, lors d’un voyage maghrébin. 

Marrakech, 1999.

Mon premier contact avec la négociation. 

Je vous brosse le tableau…

J’ai 12 ans et ce sont me premières vacances en famille au Maroc.

Choc culturel et tourbillon pour mes sens de jeune ado : mon premier contact avec Marrakech est frontal. Presque brutal.

Un chauffeur vient nous chercher à l’aéroport. Sur la route, on dépasse des mobylettes sur lesquelles se trouvent des familles entières. Le père tient le guidon, un enfant entre ses bras. Derrière lui sa femme. Entre eux, un autre enfant. Et parfois un bébé assis sur le guidon.

On approche de la vieille ville.

Des enfants courent pieds nus autour de la voiture. Ils la frôlent. 

Une angoisse me serre la poitrine. Le chauffeur ne ralentit pas.

Il s’arrête enfin sur une petite place. Juste à l’entrée des ruelles de la médina.

Il sort les bagages du coffre. Mon grand-père paie la course. Et… Stupeur ! tout le monde s’agenouille et se prosterne autour de nous. Une voix nasillarde s’élève de je ne sais où. Dans une langue que je ne comprends pas… Elle chante.

C’est l’heure de la prière.

Je n’ai jamais vu ça…

Dans les souks, je suis frappé par les odeurs : 

  • Les épices.
  • L’encens.

 

Et dans le quartier des tanneurs… Une puanteur atroce qui soulève le cœur.

Dans les ruelles, des mobylettes et des motos circulent à toute vitesse. Il faut sans cesse s’écarter pour les laisser passer…

Marrakech est un tourbillon pour les sens.

Je suis aussi frappé par les couleurs. Le bleu Majorelle. La terre rouge. Les djellabas, les tapis berbères… Ici, tout est plus intense !

Place Jemaa-el-fna. La journée, un cirque permanent. Rythmé par la musique des charmeurs de serpents. Les montreurs de singes. Les porteurs d’eau… Ça grouille de monde.

Le soir, en quelques minutes, une centaine de restos éphémères se montent. Sous des toiles de tentes. L’odeur des grillades envahit la place. Les musiciens de rue animent la soirée avec leurs instruments traditionnels : nira, bendir, qanoun…

Je suis choqué aussi par la pauvreté.

Marrakech est une ville de contrastes, ça c’est sûr.

Un matin, je sors me promener avec mon grand-père. Direction : le souk des teinturiers, pour acheter un tapis berbère.

On se promène. Mon grand-père s’arrête de temps en temps pour regarder une pièce. Des vendeurs en djellaba s’approchent, mais il les balaie d’un revers de main.

Tout à coup, son œil s’allume et devint plus brillant. Je suis son regard… Et je tombe sur LE tapis berbère !

Des couleurs chatoyantes. Des motifs qui s’entremêlent. Le tissage est parfait ! Une véritable œuvre d’art.

Mon grand-père ne dit rien, mais je le connais assez pour voir qu’il bout à l’intérieur.

Un vendeur s’approche :

  • Combien, khouya ? demande mon grand-père sans sourciller.
  • C’est 10.000 dirhams, patron. (1000 euros).
  • Hmmm… Je ne t’en donnerai pas plus de 500 dirhams.
  • 500 ?! Pas possible. C’est un tapis tissé à la main. Il faut plus de 100 heures de travail. Je veux bien faire un effort pour toi, patron, mais pas en dessous de 9500 dirhams.

 

Il s’ensuit une âpre négociation. Je vois mon grand-père comme je ne l’ai jamais vu. Dur. Rigide. Inflexible. 

J’ai des images colonialistes qui me viennent en tête. Je suis gêné pour lui…

Nous sommes à l’aise financièrement. Mon grand-père n’a pas besoin de mettre tant de pression sur ce pauvre type qui porte une djellaba usée et des babouches trouées.

Je trouve ça agressif et injuste.

Je ne comprends pas. Je n’ai jamais vu mon grand-père dans un tel rapport de force. J’ai de la peine pour ce pauvre homme et son travail.

Mon grand-père et lui finissent cependant par conclure l’affaire pour 3000 dirhams. Moins du tiers du prix demandé initialement.

Au final, tout le monde a l’air content. Même le vendeur. Mon grand-père et lui auront même une discussion très amicale autour d’un thé à la menthe… 

Alors là, je ne comprends plus rien.

Le fin mot de l’histoire ?

Je ne l’aurai que plusieurs années après. Lors d’une discussion avec mon grand-père.

La première chose qu’il m’explique c’est qu’au Maghreb, la négociation fait partie intégrante de la culture. Et particulièrement à Marrakech. La négociation y est perçue avant tout comme une discussion. Et non comme un rapport de force.

Le prix proposé par le vendeur intègre donc naturellement cette notion. Il est plus élevé que la valeur réelle du produit.

Mais… La valeur réelle d’un produit… Le juste prix. Qu’est-ce que c’est VRAIMENT ?

Est-ce que ce n’est pas simplement le prix qui convient à tous les partis ? Au vendeur comme à l’acheteur ?

Pour y parvenir, il faut essayer de comprendre les besoins et les motivations de l’autre. Identifier ses émotions. Faire preuve d’empathie.

On peut parfois trouver un accord plus créatif que négocier simplement le prix.

C’est exactement ce que mon grand-père a fait lorsqu’il négociait son tapis à Marrakech. Il connaissait très bien les besoins et les motivations du vendeur. Et l’accord qu’il a obtenu convenait finalement très bien au marchand.

Dans son livre « Ne coupez jamais la poire en 2 », Chris Voss, ancien négociateur du FBI, explique que la négociation est avant tout une question de gestion des émotions.

Les vôtres ?

Pas seulement…

Vous devez gérer vos émotions ET celles de votre interlocuteur pour pouvoir trouver l’accord le plus juste.

C’est logique. 

Les décisions d’achat sont toujours émotionnelles.

Toujours.

À partir de là, tout l’art de la négociation consiste à trouver un terrain d’entente et une solution « gagnant – gagnant » qui satisfera les 2 partis.

Si vous voulez, vous aussi, améliorer vos compétences en négociation, je vous invite à lire cet article sur comment mieux négocier ses devis face à ses clients. 

Vous y trouverez notamment :

  • Les motivations secrètes qui poussent votre client à négocier
  • Les 7 stratégies de négociation utilisées par les meilleurs négociateurs (parfois toutes en même temps !) et comment les contrer
  • Les 6 principes clés qui devraient guider toutes vos négociations dès aujourd’hui

 

En attendant, je me ferai un plaisir de répondre à vos commentaires que je vous invite à partager ci-dessous. Je serai ravi de découvrir votre expérience de la négociation !

P.S. : mon grand-père n’est plus de ce monde aujourd’hui. C’était quelqu’un que j’admirais profondément. Pas uniquement pour ses talents de négociateurs dans un souk. Mais aussi pour la chaîne de restaurants qu’il aidée à lancer.

2 réflexions sur “La leçon marocaine de mon grand-père sur la négociation”

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